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Comma

Entre 2 images

Comme la vision des images, l’ouïe est une merveilleuse invention. Il devient possible d’entendre et de comprendre toutes sortes de notions sonores. La voix humaine, c’est très pratique, car lorsque l’on connaît la langue, il devient facile d’échanger pour se comprendre, pour exister. Il y a toutes sortes de sons et en particulier la musique. La musique, cela s’entend, cela s’écoute, cela se subdivise à l’instar du « Comma ».

Comma

Avec le concept de « Comma », les images intermédiaires obtenues à partir de A et B possèdent des éléments sémiologiques et iconographiques perturbés.

Vidéogramme sur le concept de la subdivision

La musique

Mais il est possible d’en parler de façon théorique. Au début, la musique c’est simple. Ce sont des notes qui se différencient par leur durée, leur intensité, leur timbre et bien sûr leur hauteur. Tout le monde connaît la gamme diatonique : do, ré, mi, fa, sol, la, si et do pour recommencer plus haut. Il existe aussi la gamme chromatique. Là c’est un peu plus compliqué, mais chacun a ses souvenirs : do, do#, ré, ré#, mi, fa, fa#, sol, sol#, la, la#, si et do pour continuer. Là c’est amusant, la suite logique n’est plus logique. Il manque le mi# et le si#. Ces deux notes n’existent pas. En fait si, elles existent dans des circonstances un peu plus complexes. Et les notes bémolisées ? Si, sib, la, lab, sol, solb, fa, mi, mib, ré, réb, do, si. Mais où sont passés le do bémol et le fa bémol, ils n’existent pas ? En fait si, mais pour les mêmes raisons que tout à l’heure.

Le piano

Lorsque l’on observe le clavier d’un piano, on constate toute une série de touches. Les blanches forment les notes dites « naturelles » et les autres notes, celles de couleur noire, représentent les altérations. En fonction de la tonalité du morceau et de son armature, le do dièse s’appellera ré bémol. Ainsi, tous les instruments dont les notes sont prédéterminées comme le piano, auront le do dièse pour équivalence au ré bémol. Il en va de même pour la guitare, dont le manche possède des traits métalliques disposés avec des écarts spécifiques que l’on nomme des frettes et qui délimitent ce que l’on appelle la touche. Ici encore, le do dièse, c’est comme le ré bémol.

Le violon

Les violonistes ont une approche un peu différente. Pour eux, un do dièse n’a pas la même sonorité qu’un ré bémol. Tout cela est une affaire de subdivisions. Entre do et ré, il y a un ton. C’est-à-dire deux fois un demi-ton. Facile ! Mais entre do et ré, il est possible de diviser un ton en 9 commas. En intégrant cinq commas à la note « do », on obtient un « do dièse ». En retranchant quatre commas à la note « ré » on obtient un « ré bémol ». Nous retiendrons qu’un comma sépare le do dièse du ré bémol.

La guitare

Nous avons tous observé un guitariste, le plus souvent avec des cheveux longs, effectuer un « bend » en tendant la corde à la manière d’un arc. Il accompagne en général son geste d’un rictus. Celui-ci part des yeux pour se terminer dans la bouche, le forçant à augmenter une grimace d’extase. Il paraît transpercé par une flèche d’or. Si la tension est progressive, il est possible d’obtenir des notes intermédiaires. Des notes qui ne sont jamais nommées. Le comma est une subdivision, le « Bend » est une tension progressive.

Le « La 440 Hz »

La note de la tonalité du téléphone est un « la ». Plus exactement un « la3 » dont la fréquence est de 440 Hz. Pour obtenir la note « si », il suffit de jouer la fréquence 493,88 Hz. Heureusement que le piano est au courant de cette disposition. La fréquence, calculée avec deux chiffres après la virgule, permet d’obtenir une subdivision abyssale.

Entre l’image « A » et l’image « B »

Transposons cette idée dans le domaine des arts plastiques en effectuant un « Bend » entre deux images distinctes. Ce calcul ne peut se faire qu’à l’aide d’un ordinateur. En effet, chaque forme doit devenir une autre forme avec une nouvelle coloration. Des couleurs et des formes qui, comme les fréquences, peuvent se subdiviser à l’infini. Il y a l’image de départ que nous appellerons « A » pour notre démonstration et bien sûr l’image d’arrivée que nous prendrons soin d’appeler « B » afin de ne créer aucune ambiguïté. Pour obtenir des intermédiaires entre l’image A et l’image B, il est nécessaire que celles-ci soit conformes à une logique structurelle. Elles doivent être pertinentes. En effet, celles-ci doivent posséder en elles les ingrédients qui rendent possible l’opération informatique. L’image A doit posséder des similitudes iconographiques spécifiques avec l’image B.

Il est donc nécessaire de connaître le processus final pour déterminer les qualités de l’image A et de l’image B.

 

Comma : deux images pour réaliser Les fonts baptismaux de l'église de Saint-Julien-l'Ars
Les fonts baptismaux de l’église de Saint-Julien-l’Ars utilisant de concept de l’exposition Comma

Sémiologie et Iconographie

Les images intermédiaires obtenues à partir de A et B possèdent des éléments sémiologiques et iconographiques perturbés. Ainsi, la nouvelle image appartient plus ou moins à son père et à sa mère. C’est avec soin qu’il faut sélectionner la bonne fréquence, la bonne composition. En effet, il est nécessaire d’organiser le « hasard » obtenu par le calcul mathématique. C’est la raison pour laquelle, l’expérimentateur reprendra chaque forme pour les positionner, les diminuer, les augmenter et jouer de leur teinte et de leur saturation. Alors, l’image terminée sera probablement remise en cause, le lendemain, guidée par les rêves ou les cauchemars d’une nuit de sommeil perturbée.

Perte de lisibilité

Après cela, le blanc de la toile surgit entre les formes issues d’un calcul sans compassion. C’est la raison pour laquelle cet assemblage d’images perd en lisibilité et devient approximatif. Elle est pleine de trous à la façon de la Gestalt : c’est-à-dire la structure à laquelle sont subordonnées les perceptions. Cette peinture est approximative, imprécise, imparfaite, à l’instar de la mise en place de cette nouvelle manière d’aborder la connaissance. En effet, ces images illustrent l’éloge de l’approximation en questionnant la transformation qui va s’opérer sur la transmission de la connaissance par les nouvelles générations. L’œuvre questionne la compréhension du « Vu ». Conséquemment, elle interroge les bases de la connaissance par des citoyens nés à partir de 2010 et dont le foyer possède l’Internet et l’Internet mobile !

De nouveaux comportements

Cette approximation des connaissances va-t-elle modifier nos comportements ? Quel type d’enseignement va-t-il falloir inventer ? Quel est le devenir de la formation et de la communication ? L’assimilation par la lecture questionnera-t-il le besoin de mémoire ?

Avant, il y avait ceux qui ne savaient rien, ou pas grand-chose. Du « juste suffisant » pour vivre dans notre société. D’autres ont appris des choses en se spécialisant sans cesse. Ici, comme partout, les intermédiaires existent.

Génération « K »

Après, il y a une autre génération, celle qui a grandi avec « des écrans vissés au poignet ». Certains l’appellent la génération « K » correspondant à la première lettre de « Katniss » : expression proposée par Noreena Hertz, qui utilise la métaphore du personnage de Katniss Everdeen dans la trilogie littéraire Hunger Games. Alors, on retrouvera les mêmes : ceux qui ne savent rien ou pas grand-chose, mais qui possèdent entre leurs mains la connaissance du monde. Grâce à cette connaissance, ils activeront leur curiosité issue d’une situation ordinaire. Alors, il en ressortira quelque chose de nouveau, comme ces compositeurs qui ne connaissent pas la musique. Ils travaillent uniquement à l’oreille, aidés de logiciels comme les séquenceurs ou les « trackers ». Les productions obtenues sont tout à fait estimables. C’est la naissance de virtuoses avec l’éclosion de talents due à cette nouvelle structure de l’information et de la communication.

Une culture approximative

Nous serons probablement envahis par des personnes dont la culture sera approximative. Ces zigotos qui se contentent de lire les trois premières lignes de Wikipédia. Cette transformation est inéluctable et il paraît difficile d’en connaître le devenir. Comme d’habitude, l’Homme fera face en créant de nouvelles communautés dirigées, pour un temps, par des sociétés numériques telles que les GAFA. (Google, Apple, Facebook, Amazon).

L’avenir

S’agit-il d’un avenir pessimiste ou optimiste ? Il est probable que le vieux professeur de latin, qui a toujours pensé que le fondement de l’apprentissage se trouvait dans les livres, devra se confronter à une autre thèse. La thèse de ceux qui pensent que ce nouvel accès à la culture fera émerger de nouveaux talents et permettra à ceux qui ne savent rien, les laissés-pour-compte, d’avoir de nouvelles possibilités d’accès à l’information et à la culture. Hier, ils rêvaient d’être acteurs ou chanteurs, aujourd’hui, ils désirent devenir Blogueurs ou Youtubeurs reconnus.

Quelques clefs pour comprendre

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Contact

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Pierre Tomy le Boucher

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Mémoire et perceptions

L’éloge de l’approximation

Mémoire et propositions plastiques

Mes propositions plastiques concernent le concept des déperditions de la mémoire et ce qu’elles entraînent sur la perception. J’interroge la mémoire digitale qui devient un renfort froid et non émotionnel du souvenir. Mes images sont pleines de trous à l’instar de la Gestalt. Il s’agit d’une perception relative, mais suffisante pour la reconnaissance d’un individu comme une image sortie d’un souvenir vaporeux. Il s’agit d’un travail sur la (Re)-connaissance à partir de formes clefs qui prennent sens dans une globalité servie par une structure de polygones constitués de droites (abstraction de la courbe).

Du Concept à la Plasticité

La mémoire est composée de petits fragments qui flottent dans une énorme masse d’oubli. Le souvenir est un objet vivant, oublié, transformé, reconsolidé, déplacé. Ainsi l’imperfection de la mémoire devient la métamorphose de la mémoire. Cette imperfection fait partie de notre humanité. Il s’agit de la plasticité cérébrale avec une adaptation et un apprentissage tout au long de notre vie. Le cerveau se modifie en permanence. C’est un réseau fluide, non statique et non contrôlé qui inclut une adaptation.

Mon travail conceptuel consiste à sélectionner une interrogation et solliciter la discipline où je pense qu’il m’est possible de participer. Cette élaboration de la question crée une tension, une argumentation qui s’exprime dans une réalité plastique.

Le sujet

Le sujet est un prétexte. Un prétexte pictural au service d’une expression. Un moyen mnémotechnique qui entretient une relation directe avec la préoccupation quasi permanente de l’efficience de notre mémoire. Cette mémoire qui concerne la vie de tous les jours. Elle guide nos gestes à chaque instant. Ce jeu de mémoire doit être capable de distinguer une information ancienne. Autrement dit, l’information est apprise, ce qui la différencie d’une information nouvelle qui sera peut-être mise dans un coin de notre âme, où sont conservées pêle-mêle, dans un modèle multi-systèmes, les informations codées sous la forme de représentations symboliques échappant au sensoriel et à la motricité.

Il s’agit d’un traitement de l’information qui surgit à un moment opportun d’une conversation où le permanent de l’information, ou l’élément indistinct, se raccroche à plusieurs réalités. Le vécu et le rêve enchevêtrés qui lâchent une information décontextualisée et amodale.

Mémoire de philosophe ou peinture numérique sur toile de Michel Onfray
Portrait de Michel Onfray – Les intelligents à la façon de l’éloge de l’approximation

Voir le vidéogramme sur Michel Onfray

Le cerveau

Le cerveau effectue une récupération instantanée qui peut être facilitée par la présence d’éléments similaires dans la situation de récupération. Il s’agit d’un fonctionnement cognitif à un niveau symbolique qui se focalise sur la structure des différents systèmes de mémoire ainsi que sur leur contenu.

Le cerveau, devenu réservoir de connaissances, stocke et restitue. Le jeu du plasticien consiste à créer la plus grande distance avec l’image réelle ou l’image photographique en ne gardant que quelques formes strictes qui deviennent le Saint Graal de la reconnaissance. Il s’agit de transformer une impression première qui devient signe de liberté en modifiant le système perceptif.

La mise en forme de mon travail se veut spécifique et cet aspect stylistique est lié à ma réflexion sur la transmission de la connaissance relevant de la mémoire, enrichie par mes activités de communicant et d’enseignant.

Les nouvelles connaissances

Je pense que la nouvelle connaissance induite par Internet et les moteurs de recherche change complètement notre attitude et notre mode de pensée face à la demande culturelle. En effet, l’Internet mobile permet à tout un chacun d’avoir une réponse pratiquement instantanée sur n’importe quelle problématique. Il en résulte de nouveaux comportements en raison d’une approche approximative. Avant Internet, la connaissance s’obtenait à partir de différents canaux : les parents, les amis, les enseignants, l’entourage et bien sûr les livres. La recherche d’informations entraînait l’effort salvateur et formatif.

La réponse apportée par les moteurs de recherche et notamment « Wikipédia » annihile tout effort. Ces réponses, souvent utilisées de façon approximative, vont-elles modifier nos comportements ?

Une peinture approximative

Pour mettre en avant, pour illustrer ce questionnement, cette réflexion, je réalise une peinture approximative, imprécise, imparfaite à l’instar de la mise en place de cette nouvelle manière d’aborder la connaissance. Une connaissance approximative. C’est pourquoi les images que je propose ont une forme approximative, une inexactitude relative, une évaluation approchée. Mes images sont trouées à la façon de la Gestalt : c’est-à-dire la structure visuelle à laquelle sont subordonnées les perceptions.

Dans ce que je propose, les trous n’empêchent pas la compréhension de l’image, par contre, ils génèrent un nouveau contexte. Ils séparent le vrai de la réalité visuelle. J’aime mettre en place des constantes, des éléments signifiants ou encore un process pour rendre identifiable cette situation picturale.

L’âme ou l’êtreté.

Dans la plupart des cas, le fond est blanc et les formes de couleur sont rarement présentées à fond perdu. Ces formes restent à l’intérieur de la toile. Il n’y a aucun dégradé de couleur. Il s’agit d’aplat. Je n’utilise jamais de courbes. Ces images sont structurées de figures géométriques planes dont chacune est formée de lignes brisées fermées : le polygone. La lame rouge qui transperce le portrait représente l’âme ou l’êtreté.

La plupart de ces réalisations se nomment « Portrait » mais dans le sens de portrait-robot comme dans une enquête de police où le témoin fait de son mieux pour retrouver les traits d’un personnage. Souvent, le résultat est approximatif mais la ressemblance est certaine.

Vous l’aurez compris, l’ensemble de mes propositions plastiques et conceptuelles tourne autour de l’approximation d’une mémoire vaporeuse. Google, Facebook et les autres vont capter un maximum d’informations de chaque individu pour en créer un double digital. Ils auront une banque de données parfaite de leurs connaissances et de leurs aspirations dans le but de faciliter leur vie et leur mode de consommation.

Le cri d’alarme

Il s’agit pour moi d’un cri d’alarme pour la formation et l’apprentissage. Le fait de tout connaître facilite le raisonnement. Le fait de savoir qu’il est possible de tout connaître peut faciliter l’absence d’apprentissage.

Dans le cerveau, une émotion provoque une décharge de l’amygdale vers l’hippocampe de l’ensemble de faits augmentant de meilleures chances de créer un souvenir. Le bon enseignant organise un apprentissage fondé sur des éléments plaisir tels que la curiosité, l’esthétique, la connivence, etc. voire l’humour. Cette règle tient compte à la fois du caractère de l’enseignant, mais également du caractère des apprenants. Il doit y avoir une compatibilité.

Le souvenir a disparu !

Le cours dure une heure. En bref, la prise de notes réduira l’intervention. En conséquence, la restitution restera sommaire. Que reste-t-il de cette information après plusieurs heures, plusieurs jours, plusieurs mois, plusieurs années ? Ainsi, le souvenir a disparu ou peut-être celui-ci s’est transformé en anecdote, une anecdote limitée, en d’autres termes, une anecdote vaporeuse. Cependant, ce même cours filmé puis placé sur YouTube, permettra, de ne perdre aucune information fondatrice, mais elle éliminera l’ambiance réelle du moment. Dans ces conditions, il faudrait peut-être 10 000 caméras et microphones, placés dans l’amphithéâtre, pour tenter l’approche d’une reconstitution qui restera toutefois parcellaire, fragmentée et en distance avec la réalité.

Le photomontage et le trouble cognitif

Les faux souvenirs affectent le contenu de la mémoire. En effet, un leader de groupe pourra arriver à modifier le souvenir d’une situation vécue de façon collective.

D’ailleurs, d’autres expériences ont été réalisées en ajoutant, par photomontage, la présence d’une petite fille dans une réunion quelconque. Quelques jours plus tard, les personnes présentes à cette réunion avaient des souvenirs précis du comportement de la petite fille. Par le jeu du questionnement et de la qualité du photomontage, un certain nombre de personnes s’est inventé des souvenirs.

Ma production plastique propose de questionner le stratagème des apprenants qui ont, par exemple, l’âge de cinq ans aujourd’hui et la manière dont ils vont acquérir la connaissance : quels en seront les moyens technologiques de restitution ?

Quelques clefs pour comprendre

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